Dans l’Ariège, au beau milieu des Pyrénées, une petite chapelle, Notre-Dame de Sabart, fait la fierté des habitants du coin. Et pour cause, l’édifice religieux rassemble des hommes depuis plus de 1000 ans grâce à une histoire rocambolesque. En effet, l’on raconte que Charlemagne, chassant les Sarrasins, n’arrivaient plus à avancer près du lieu où la chapelle allait être construite. Son cheval restant bloqué, le chef de guerre décida de creuser afin de savoir ce qui l’empêchait d’avancer. Stupéfait, il découvrit une statue de la Sainte Vierge. Cette découverte lui permit une belle victoire contre les Sarrasins. C’est ainsi que Charlemagne fit construire la chapelle Notre-Dame de Sabart, toujours debout aujourd’hui.

Un historien trouverait cette histoire peu plausible et si l’on en croit les habitants, tout le monde considère ceci comme une légende. Mais quelle importance ?En France, dans chaque département, vous trouverez des dizaines d’édifices à la gloire de la Sainte Vierge, de simples oratoires à d’immenses cathédrales. En réalité, ces sanctuaires sont les témoins, non pas tant d’une histoire, mais plutôt de l’intérêt des hommes pour le sacré et de la transcendance des communautés à travers les âges.

Et ce sens du sacré est servi par les légendes racontées oralement de générations en générations, où l’on ne sait pas vraiment la vérité mais qu’importe, la communauté s’est rassemblée autour d’une identité commune, d’un sens du sacré qui ne s’est jamais effacé en plus de 1000 ans d’histoire.

Dans une société de marché, matérialiste et inhumaine, on sera toujours étonné de voir ces petites gens rassemblées derrière une statue au fin fond des Pyrénées, de voir des habitants défendre une statue menacée de déboulonnage en Bretagne, de constater l’union d’un peuple devant une cathédrale en feu à Paris. Le sacré précède la civilisation, le culte précède la culture.

Si chacun peut douter de l’existence de Dieu, on ne peut pas nier l’importance des rites, des légendes fondatrices, dans la construction d’un nouveau monde. Pour le militant, il ne s’agit pas seulement de s’acheter de beaux T-shirts sur Jeanne d’Arc, mais surtout de s’attacher aux traditions locales dans un souci d’enracinement, de transmission et de rassemblement pour faire perdurer le bien commun, l’esprit de communauté et de se lancer à corps perdu dans la fondation d’une nouvelle ère, sous le signe de l’espérance.