Éloge de la guerre | Dextra

Il nous fallait une nouvelle guerre! Après la victoire contre la Covid, face à un adversaire aussi coriace, il fallait au moins un Russe à nos médias pour nous maintenir en haleine devant le 20h. Ce qui est bien avec eux, c’est qu’il peut y avoir douze guerres et cinquante conflits armés actuellement dans le monde, à les entendre, il n’y en n’a plus qu’un et il n’y en a jamais eu qu’un depuis au moins la deuxième guerre mondiale. Oublié, l’Irak, la Libye ou le Kosovo. Oublié le Mali, le Tchad ou le Sahel, ne parlons même pas du Yémen, où en termes d’extermination de peuple on est plutôt pas mal.

L’Ukraine c’est « in », l’Ukraine c’est « choc ». Et puis ça permet de donner des allures de chef de guerre mal rasé à notre président qui du fond de son bunker et sous les bombes ennemies dirigerait les opérations… Contre un pays face auquel nous ne sommes surtout pas en guerre… L’art du «en même temps». Pendant ce temps, un ploutocrate mafieux érigé en nouveau Gandhi est promis au prix Nobel de la Paix… Après tout, Obama y a bien eu droit lui aussi.

Si côté pile, les médias lavent les CV de nos chefs d’Etat plus blanc que blanc, côté face, ils découvrent avec stupeur et horreur ce qu’est la guerre. La guerre ça tue! La guerre, c’est des bombes qui tombent à côté de leurs objectifs et tuent des civils. La guerre, c’est le jeu du poker menteur où chaque camp montre bien ce qu’il a envie de montrer, ou l’autre voit bien ce qu’il a envie de voir et où la saloperie est en réalité la chose à peu près la mieux partagée entre les deux camps.

On se scandalise aujourd’hui des destructions d’infrastructures civiles, mais on applaudissait les bombardements de Belgrade qui devaient renvoyer ces affreux à l’âge de pierre. On pleure les pertes civiles mais en Libye ou en Irak on se foutait pas mal de savoir où tombaient les bombes qui se trompaient d’adresse. On s’offusque des bombes à sous munitions russe, mais on oublie opportunément les munitions à uranium appauvri qui polluent les sols depuis la guerre du Golfe et du Kosovo entre autres.

A l’arrière, on assiste à un vent patriotique et à un zèle inégalé depuis la guerre de 14. Si le Covid était plus dans les tons du vert de gris avec ses délations, ses couvre-feu et ses résistants d’opérette, là on est dans le rouge garance et le bleu horizon. On boycotte, on débaptise, pour un peu on lancerait un ou deux pogrom de Ruskoffs sous les applaudissements du public et on pourrait avoir droit à un reportage complaisant au 20h. Bientôt une équipe pour suivre une ratonnade prés de la rue Daru? On arrête de produire Tchaïkovsky, on ne vend plus de tarama et de caviar, et la station Stalingrad a bien du souci à se faire : on parle bien de débaptiser un lycée Soljenitsyne. Dans l’Absurdistan dans lequel nous vivons, on oublie, toute raison, toute base élémentaire de droit. Le président de la CARPA des Hauts de France a décrété de son propre chef qu’il fallait geler tous les avoirs des personnes ayant un nom à consonance russe. La CARPA, c’est l’instance chargé en droit de garantir que les fonds dans les affaires judiciaires aillent bien aux victimes. On n’est pas loin de la chasse au prépuce des années 40, mais cette fois ça passe. Tant pis si les Polaks anciens mineurs subissent le même sort que les méchants Russes, chaque guerre a ses victimes.

Une chose est sûre, la nature humaine n’est pas jolie jolie. Si la poésie d’un drone piloté 150km derrière la ligne explosant une caserne titille le virilisme de boutonneux adolescents, il serait bon que les va-t’en guerre qui applaudissent à la distribution d’armes et à la création de milices populaires en Ukraine, se rappellent que ces armes serviront plus sûrement à dessouder du petit Européen que du cosaque: le trafic d’armes et les détournements de fonds étant déjà un sport national en Ukraine, l’argent envoyé servira plus surement à financer les mafias locales qu’à défendre la mère patrie.