Jeux Africains est le premier livre d’Ernst Junger, roman ou récit autobiographique qui mène le jeune Junger en Afrique. C’est d’abord un jeune adolescent qui rentre en terminale et qui garde précieusement le quelque argent que son père lui a donné pour acheter ses fournitures scolaires. Car ce lycéen ne rêve pas à sa retraite future mais d’aventures et d’aventures en Afrique. L’aventure avait commencé par un livre, sur l’Afrique comme il se doit, l’enfant voyageait déjà par les livres. Junger était déjà un grand lecteur, mais à quoi bon ; à 17 ans c’est l’aventure, la vraie qu’il cherche, aller là où les cartes sont encore blanches, découvrir le monde quoi ! C’est donc muni de l’argent des manuels scolaires, d’un petit revolver et de son livre qu’il fugue vers la France, vers Verdun après s’être arrêté à Metz (encore allemande avant la Grande Guerre), c’est là que se trouve le bureau de recrutement le plus proche de la Légion étrangère : quoi de mieux pour l’aventure que la Légion quand on a 17 ans ?
Mais dès avant l’aventure a commencé : la fuite, la peur du contrôleur de train, les heures seul dans les grandes villes, les nuits dans les hôtels miteux, le temps qui change de rythme, une heure d’aventure valait déjà mieux qu’une vie d’écolier… Puis la première décision digne d’Achille, on jette l’argent pour n’avoir plus rien que ses rêves et pour forcer l’aventure.
La frontière, puis le poste de recrutement : la carrière militaire de Junger commence sous les drapeaux français. Et direction Marseille d’où l’on part pour le continent rêvé. Mais l’aventure ressemble moins au rêve : on fait des rencontres, certes, mais pas toutes sympathiques, on se fait voler ses bottes pendant le sommeil, on boit des litrons de vin avec des rengagés, des forçats, des futurs légionnaires, pas des écoliers qui ont menti sur leur âge pour s’engager.
Marseille, l’attente, l’ennui.
Puis l’Afrique, chaude, écrasante et l’ennui aussi ; les tâches répétitives de l’armée, le balai, la poussière… Et l’aventure qui ne vient toujours pas. Alors on la saisit quand un camarade propose de s’enfuir, d’aller la chercher plus loin maintenant qu’on est là. Et c’est la fuite encore, l’aventure, et l’arrestation : on passe dans ces geôles africaines des moments forts distrayants, on s’amuse, on boit, on se fait des amis, l’aventure quoi !
Et le bon père nous retrouve, nous envoie une lettre toute compréhensive, nous invite à revenir, nous envoie de l’argent, nous exhorte, non pas à renoncer mais à se former et à écrire ; alors on rentre et on écrit.
Junger est l’un des plus grands aventuriers du dernier siècle, l’un poète guerrier, l’un des plus grands écrivains et certainement l’un des plus grands rêveurs. Cette aventure africaine n’était pour lui que jeux d’écolier : la vraie aventure est toujours le rêvée.
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