Issue d’une famille géorgienne ruinée par la révolution russe, Hélène Carrère d’Encausse est une historienne spécialiste de l’histoire de la Russie, membre de l’Académie française depuis 1990. Elle écrit en 1998 Lénine.
Cette biographie de la vie de Vladimir Ilitch Lénine permet de découvrir les origines familiales de l’homme qui sera la tête pensante principale des bolcheviks. A travers son parcours, on distingue la particularité des origines de la plupart des premiers bolcheviks : il s’agit bien souvent de petits ou moyens bourgeois ayant des origines culturelles, religieuses et ethniques variées. La jeunesse de Lénine permet de comprendre les influences idéologiques et politiques qui imprégnaient la Russie de la fin du XIXème siècle, très marquée par le nihilisme. Au cours de son ascension dans le milieu socialiste russe et international, Lénine forge sa réflexion qui l’amènera en 1902 à les mettre par écrit dans Que faire ?. Cet ouvrage majeur dictera sa ligne de conduite bien qu’il sache s’en écarter le cas échéant. Homme d’esprit à la capacité de travail impressionnante, Lénine se révèle à l’aise dans les discussions de salon zurichoises, pour haranguer les foules en pleine rue à Saint-Pétersbourg ou pour défendre avec acharnement ces vues en réunion du Comité central bolchevik. Si son autorité n’est pas incontestée, son empreinte sur les prises de position qui feront gagner les bolcheviks sont indéniables.
A travers la vie de Lénine apparaît également l’état de la Russie en basculement entre le XIXème et le XXème siècle. Société aux apparences immuables mais en réalité en pleine mutation et à la recherche de nouveaux repères. Le parcours de Lénine entre les petites villes de province, la capitale ou en exil dans la campagne sibérienne nous offre un tableau réaliste et presque complet du pays.
Le livre nous permet d’avoir une illustration parfaite du paradoxe de la police russe de cette époque. L’exécution du grand frère de Lénine le marquera beaucoup mais le relatif laxisme dont il va bénéficier ne peut que surprendre. Alors que la police connaît parfaitement ces agissements, elle ne l’inquiétera jamais sérieusement jusqu’à son exil confortable.
Enfin, l’ouvrage nous permet de comprendre la transition entre la prise du pouvoir et le « contrôle » du pouvoir. Les bolcheviks récupèrent un pays en voie de déliquescence et c’est l’urgence de la situation qui va les obliger à prendre des mesures extrêmes : traité Brest-Litovsk, épuration des koulaks, …
L’appareil bolchevik va également rapidement muter en centralisant tous les pouvoirs et en effaçant ceux des soviets. Les bolcheviks ne commettent pas l’erreur des gouvernements précédents et trancheront dans le vif pour sauver la révolution russe.
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