“Les bolcheviks prennent le pouvoir – La révolution de 1917 à Pétrograd” d’Alexander Rabinowitch | Dextra

Professeur de l’Université de l’Indiana et historien spécialiste de la révolution russe de 1917 et de l’URSS, Alexander Rabinowitch écrit en 2004 Les bolcheviks prennent le pouvoir – La révolution de 1917 à Pétrograd. 

L’ouvrage débute au soulèvement de juillet 1917 où les bolcheviks, surpris par l’évènement, auront du mal à se positionner mais sauront tirer les leçons de cet échec. La suite nous entraîne avec une grande précision dans les diverses réunions parlementaires, des soviets et des comités bolcheviks jusqu’à la prise du pouvoir par les bolcheviks. L’aspect très détaillé voir journalistique du livre permet de comprendre l’évolution de la situation très troublée dans laquelle évolue les bolcheviks, entre marginalisation totale et retournement favorable.

L’intérêt majeur de l’ouvrage est de nous donner une vision réaliste du fonctionnement interne du parti bolchevik qui va à l’encontre de l’image communément répandue. Si le parti bolchevik deviendra une puissante machine autoritaire et centralisatrice après son accession au pouvoir, dans la période précédente ce ne sera pas le cas.

Les bolcheviks sont minoritaires aussi bien sur l’échiquier politique national russe que dans le milieu socialiste. Ils passent plusieurs fois du stade de force politique à organisation groupusculaire. Il est vrai qu’à la veille de la révolution d’octobre 1917 le parti ouvrira ces portes au plus grand nombre afin de disposer d’une force de frappe directe mais cette dernière image ne doit occulter ce qui fût la réalité de 1903, date de la scission avec les mencheviks et socialistes-révolutionnaires, à juillet 1917.

Ce petit nombre est compensé par la qualité des membres de l’organisation. Plus qu’un fanatique endoctriné, le militant bolchévik a avant tout l’état d’esprit du « révolutionnaire professionnel » qui lui permet d’obéir aux directives de la hiérarchie ou de savoir les adapter lorsque les impératifs du terrain le justifient. De même, lorsqu’une partie des cadres bolcheviks sont emprisonnés ou en clandestinité, le mouvement ne s’arrête pas et il se trouve de nouveaux membres pour les remplacer. Cette capacité d’adaptation et cette polyvalence des militants apparaissent notamment lors des périodes de répressions policières et de fermetures de locaux et imprimeries qui ne semblent pas affecter la capacité de travail des bolcheviks.

Enfin, il transparaît dans les échanges de courriers et au cours des réunions que le fonctionnement des bolcheviks laisse libre cours à la contradiction et aux débats. Plus d’une fois le Comité central prendra des décisions contraires aux avis de Lénine et celui-ci devra sans cesse défendre et argumenter ses positions pour emporter une décision. 

Un autre intérêt de l’ouvrage est de nous montrer l’état de déliquescence du Gouvernement provisoire qui souhaitait continuer la guerre ne parviendra pas à rétablir la situation intérieure du pays et perdra petit à petit tous les soutiens  possibles jusqu’à se retrouver définitivement seul.