Merci les ukrainiennes | Dextra

Dans le conflit qui oppose la Russie à l’Ukraine, les Français ont découvert, médusés, sur leur portable, la violence d’un conflit en Europe, pas si loin que ça. De nombreuses vidéos circulent sur les réseaux sociaux, les chaînes TV font intervenir n’importe qui sur le sujet mais au moins, il n’est plus question du Covid.

Pourtant, dans ce flot d’informations, deux françaises lesbiennes ont tout de même réussi à retenir l’attention et à alimenter un débat bien connu en France : celui de la GPA. En effet, les deux bobos sont restées bloquées en Ukraine lorsqu’elles sont allées chercher leurs enfants nés par GPA.

Une première réflexion s’impose, la loi française ne change finalement pas grand chose au phénomène de GPA car de toute manière, les demandeurs achètent leurs bébés dans d’autres pays. Elisabeth Badinter, favorable à une GPA éthique l’expliquait déjà en 2013 : “la GPA existe ailleurs, elle ne va pas s’arrêter parce qu’on la refuse”. Ainsi la France se retrouve coincée dans le système mondial libéral, où le marché est plus fort que l’Etat.

Le couple de bobos le prouve bien, leur égoïsme est tel qu’elles ne s’inquiètent à aucun moment du sort réservé aux femmes ukrainiennes qui louent leur ventre. Non, ce qui importe, c’est que leur petite commande soit en bon état sur place.

Mais plutôt que de se moquer, à juste titre, de ces profils types de couple moderne, intéressons-nous à la pratique de la GPA en Ukraine.

Avant 2015, la GPA était particulièrement forte dans certains pays d’Asie. La pratique étant trop chère aux États-Unis, en Australie ou en Angleterre, les couples ne pouvant pas se payer une GPA de luxe dans leur pays se dirigeaient vers les ventres asiatiques à bas coût. Mais voilà, des états s’étaient rendus compte qu’un trafic d’êtres humains très lucratif et violent naissait à cause de la GPA. Ainsi, l’Ukraine, où la GPA est légale depuis 2002, est rapidement devenue la plaque tournante de cette pratique.

En Ukraine, la GPA se vend comme un paquet de Kinder Bueno. Affiches publicitaires, petites annonces dans les journaux et sur les réseaux sociaux, tout est bon pour louer son ventre. La clinique BioTexCom propose 11 000 dollars aux loueuses, en plus des 200 euros mensuels. Autant vous dire que les femmes qui choisissent de se lancer dans ce doux marché ne le font pas par compassion pour les petites bourgeoises occidentales.Il faut d’ailleurs noter que cette même agence a profité du conflit pour construire son petit slogan : “Faites des bébés, pas la guerre”.

Les conditions physiques et matérielles des femmes ukrainiennes sont désastreuses. Alina, jeune femme ukrainienne décrit pour Al Jazeera, son expérience : “Nous étions traitées comme du bétail”.

Si ces femmes en détresse ne sont pas bien traitées, les clients, eux, sont rois. Choix du sexe, pas obligés de connaître la mère porteuse, analyse génétique de l’embryon etc. Un véritable catalogue marketing. Et les retours sont bien sûr dithyrambiques. Certains ne comprennent pas les critiques ! Les agences les suivent très bien et sont à leur service.

Le conflit ukrainien aura au moins permis de montrer au monde entier tout le cynisme des Occidentaux, toute la violence du désir bourgeois dans les pires moments. “La médiatisation de couples recourant à la GPA en Ukraine alors que la guerre surgit dans une violence inouïe agit tel un révélateur. La mécanique sous-jacente de la GPA, d’un cynisme implacable, apparaît désormais en pleine lumière : elle révèle un marché sans foi ni loi” rappelle la journaliste Céline Revel-Dumas dans une tribune du Figaro.

Nota bene : la GPA est légale en Russie depuis les années 1990.