Los Angeles, 1992. Un afro-américain fonce à toute allure au volant de sa voiture. Poursuivi par la police, il finit par s’arrêter mais, sous l’effet de l’alcool, refuse de sortir de son véhicule et se débat. Deux coups de taser ne suffiront pas à le maîtriser et quatre agents de police (blancs) le passent à tabac… tout cela sous l’œil d’une caméra d’un habitant du quartier. La suite vous la connaissez, pendant 6 jours Los Angeles sera le lieu d’émeutes d’une intense violence : une soixantaine de morts, des milliers de blessés, des incendies un peu partout et près d’un milliard de dollars de dégâts. Il faudra l’intervention de garde nationale et une campagne de pacification militaire urbaine pour garantir le retour à l’ordre public.
Des Draft Riots de 1863 à New York, aux émeutes plus récentes de Black Lives Matter, les troubles sociaux et économiques vont souvent de pair aux États-Unis, et désormais chez nous également, avec les tensions raciales.
La population historique de Los Angeles ne comprend que des blancs et des noirs. A partir de la moitié du XXème siècle de plus en plus de latinos viennent s’y ajouter et font subir une cruelle concurrence aux afro-américains qui se font « grand remplacer » en tant que main d’œuvre bon marché. La situation s’aggrave encore avec l’arrivée des coréens à partir des années 70’. Ces derniers rachètent ou ouvrent des petits commerces de proximité (épicerie, débit d’alcool, …) et s’imposent rapidement en monopole dans de nombreux quartiers populaires.
Mises en concurrence les unes entre les autres, la haine entre toutes ces communautés ne fait qu’augmenter et le cocktail devient explosif. Un an avant les émeutes de 1992, la gérante d’une épicerie coréenne abat d’une balle en pleine tête une adolescente noire qui avait volé une bouteille de jus d’orange… c’est beau le libéralisme.
Bref, au moment où ça pète, entre deux chasses aux blancs qu’on arrache de leurs véhicules en pleine rue, on crie haro sur le baudet coréen et leurs petits commerces. Ces derniers, bonne poire et fiers américains, sont convaincus que la police va venir à leurs secours. Mais la police, dont une grande partie des effectifs n’est pas mobilisée pour diverses raisons, ne vient pas et se contente de protéger les quartiers riches de Beverly Hills et compagnie…
Alors l’improbable se produit : bientôt les toits des habitations et commerces coréens se peuplent d’hommes en armes, les fameux « Roof Koreans ». Les radios locales coréennes appellent tous les immigrants à se rendre dans les quartiers attaqués pour défendre leurs frères. En quelques heures Koreatown se transforme en une véritable forteresse.
Cette réaction rapide s’explique par plusieurs facteurs : les coréens de l’époque ont une culture de la guerre (Guerre de Corée pour les plus vieux et service militaire au pays pour les plus jeunes), ils possèdent beaucoup d’armes (certains sont propriétaires d’armureries) mais surtout ils ont conservés un lien communautaire fort (entretenu par la barrière de la langue).
En plus de nous ravir de vidéos et de clichés incroyables où des Pokémons à tête de profs font fuir des hordes de pillards à coups de flingues, l’expérience des coréens de Los Angeles nous rappelle que les tensions et violences interraciales sont une composante inhérente aux sociétés libérales, et donc immigrationnistes. Elle nous rappelle également que, selon que vous serez riches ou pauvres, la police aura pour priorité de vous secourir, ou non. Elle nous rappelle enfin que, indépendamment de notre refus de ce système et de la cohabitation de peuples étrangers qu’il engendre, nous sommes obligés de nous défendre contre d’autres communautés qui sont importées chez nous par ce même État que d’aucun persiste à voir comme leur meilleur défenseur.
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