“Adieu, adieu, Salins, Salins et Besançon” peut-on entendre dans la célèbre chanson Réveillez-vous Picards. Si la ville de Besançon est encore connue aujourd’hui, on ne peut pas dire que ce soit le cas pour Salins. Petite ville d’à peine 3 000 habitants, il ne reste qu’un musée et des sources thermales d’une industrie qui, autrefois, était le poumon de la Franche-Comté.

L’essor et la chute de la grande saline franc-comtoise s’explique par le développement technique. Dès le Ve siècle avant Jésus-Christ, les hommes commencent à exploiter les riches ressources en sel. Très recherché, l’or blanc attire les convoitises et permet à la région de développer un commerce fructueux grâce à son emplacement géographique, sur l’axe Rhin-Rhône.

Au début du Moyen-Âge, la ville de Salins se développe de plus en plus. Propriété d’une abbaye, l’extraction de sel est ensuite remise aux mains de seigneurs locaux pour se retrouver chez les ducs de Bourgogne. Durant des siècles, l’extraction de sel est réalisée par un système simple : la noria. Le fonctionnement est celui-ci : une chaîne de sceaux récupère petit à petit l’eau souterraine, de laquelle est extraite le sel. Un cheval tire continuellement le tout. A la fin du XVe siècle, le Saint-Empire Romain Germanique récupère la Franche-Comté. S’ensuit alors une période très prospère.

Malheureusement, les guerres incessantes fragilisent la santé de Salins au XVIIe siècle. Lorsque Louis XIV envahit la Franche-Comté en 1674, Salins appartient définitivement au Royaume de France. C’est un nouveau souffle pour la ville qui dépasse les 5 000 habitants à la fin du siècle et voit l’arrivée de communautés religieuses. Dans le même temps, le développement technique permet de construire de nouvelles roues pour extraire plus de sel. En 1750, la noria est remplacée par un système de pompage. Il est à noter que l’extraction se fait de plus en plus profonde au fur et à mesure du temps. En effet, pendant le Moyen-Âge, les hommes avaient peur de creuser trop profond et d’atteindre l’enfer. 1773 marque la naissance des salines royales d’Arc et Senans. Ce nouveau bâtiment permet de répondre à la demande de plus en plus forte en sel. Un réseau de tuyaux de 20 kilomètres est installé de Salins à Arc-et-Sens.

Le XVIIIe siècle signe l’apogée et la fin des salines. L’industrie est florissante au début du siècle. Toute la ville de Salins fonctionne autour de l’usine. Travaillant dans des conditions difficiles, les ouvriers des salines sont chouchoutés. Primes pour les femmes enceintes, système de retraite, médecins à disposition, auberge, toute l’usine fonctionne comme une ville à l’intérieur de Salins. Le nombre d’habitants ne cesse de croître et atteint les 10 000. Mais le développement des transports va mettre à mal la vie de Salins. En effet, l’arrivée du train facilite le transport de sel et conduit le marché à se diriger vers la mer, source inépuisable de sel, contrairement aux ressources limitées de Salins. Limitées car le nouveau système de forage pour récupérer le sel conduit à une quasi-saturation. C’est le début de la fin. Enfin, le XXe siècle signe la mort de cette industrie franc-comtoise. Principal responsable : le réfrigérateur. L’habitant moyen n’a plus besoin de sel pour conserver ses aliments et se tourne vers cette technologie révolutionnaire.

Aujourd’hui, Salins n’existe que par ses sources thermales et son musée passionnant. Les anciennes maisons du centre sont peu à peu abandonnées, quelques commerces subsistent pour moins de 3 000 habitants. Le développement de la technique a conduit à la mort d’une ville, autrefois fierté de la région.